Transparence financière : analyse des réponses des banques par Eric Loiselet
Analyse des retours reçus des banques sollicitées dans le cadre de la mise en œuvre du 7.3 du règlement budgétaire et financier du Conseil Régional
Rappel du 7.3 du règlement budgétaire et financier du Conseil Régional
Le règlement budgétaire et financier du Conseil Régional comporte un article 7 « transparence financière » dont le 3ème alinéa 7.3 porte sur les « obligations d’information de la Région par ses partenaires bancaires et financiers ». Les termes de ce 7.3 sont les suivants :
« La Région demandera aux établissements avec lesquels elle aura contracté, en application du présent règlement, de présenter annuellement, au plus tard dans les six mois suivant la reddition des comptes annuels un état portant information :
– De la Raison sociale sous laquelle eux-mêmes, ou les établissements dans lesquels ils possèdent une participation, opèrent :
– Du chiffre d’affaires et du résultat d’exercice enregistrés ;
– Des effectifs employés ;
– Des impôts et taxes versés aux autorités publiques locales, dans le cadre des lois fiscales en vigueur. »
Modalités d’application du règlement
La direction des Finances de la Région a adressé un premier courrier de demande d’informations le 5 septembre 2011 aux 5 établissements bancaires et financiers avec lesquels elle a contracté, à savoir :
- BCME, filiale bancaire du groupe du Crédit Mutuel Arkéa, dédiée aux entreprises et aux institutionnels, est devenue, le 7 novembre 2011 ARKEA Banque Entreprises et Institutionnels, « banque multi-métiers, partenaire de référence des acteurs du développement local » ;
- CACEIS, filiale du Crédit Agricole spécialisée dans la conservation de titres, l’administration de fonds et la prestation de services aux émetteurs de titres. CACEIS est présent dans 11 pays ;
- Caisse d’Epargne Lorraine Champagne-Ardenne (CELCA) ;
- Dexia ;
- HSBC ;
- Société Générale.
Le courrier listait les informations recherchées en vertu du 7.3 ci-dessus, précisait qu’elles étaient demandées « par établissement dans lequel votre banque ou son groupe d’appartenance détient une participation » et indiquait que l’état demandé devait retracer l’activité du partenaire ou des son groupe d’appartenance dans les Etats et territoires non coopératifs (ETNC) mais aussi dans les Etats et territoires coopératifs (ETC).
Enfin l’envoi du rapport annuel 2010 était aussi demandé.
Un premier rappel a été envoyé le 4 octobre et un second le 24 novembre.
Le 5 décembre, la Commission des Finances du Conseil Régional a pris connaissance des démarches engagées et des réponses reçues.
Etat des réponses reçues
Au 5 décembre 2011, sur les 6 partenaires bancaires sollicités :
- 2 avaient répondu au 1er courrier : Dexia et Société Générale ;
- 2 au 1er rappel : CACEIS (groupe Crédit Agricole) et HSBC ;
- 2 n’avaient pas répondu à la date du 5 décembre (soit 3 mois après l’envoi du premier courrier) : BCME / ARKEA Banque Entreprises et Institutionnels et la Caisse d’Epargne Lorraine Champagne-Ardenne. BCME / ARKEA ayant répondu par courrier en date du 6 décembre, je vous propose de bien vouloir prendre, à titre dérogatoire, en considération la réponse.
Analyse des réponses reçues
Le tableau suivant propose une analyse des réponses reçues à partir de plusieurs critères simples d’appréciation :
* ETNC : Etats et territoires non coopératifs , ETC : Etats et territoires coopératifs
** PJF : Paradis judiciaires et fiscaux
La réponse de HSBC se caractérise par les éléments suivants :
- Un courrier explicatif
- Accompagné du dernier rapport annuel (2010) ou du document de référence
- Mentionnant la présence du groupe HSBC dans plusieurs ETNC et l’absence d’HSBC France dans de tels territoires
- Ne mentionnant pas la présence du groupe HSBC ou de HSBC France dans des ETC ;
- Ne fournissant aucune indication sur l’activité d’établissements ou filiales du groupe HSBC ou de HSBC France dans un paradis judiciaire et fiscal et aucune information sur la politique du groupe ou de la banque sur ce sujet ;
- Donnant quelques informations sur la politique de lutte anti blanchiment du Groupe HSBC et de HSBC France
- Proposant de poursuivre le dialogue sur ces questions en donnant le nom et les coordonnées d’un interlocuteur spécialisé.
La réponse de DEXIA se caractérise par les éléments suivants :
- Un simple courrier sans explications
- Accompagné du dernier rapport annuel (2010) ou du document de référence
- Le courrier ne mentionne donc pas la présence ou non de DEXIA dans les ETNC ;
- … ou dans des ETC ;
- Il ne fournit donc ni indication sur l’activité d’établissements ou filiales de DEXIA dans un paradis judiciaire et fiscal ni information sur la politique de DEXIA sur ce sujet ;
- Une annexe d’une page décrit les principes généraux de DEXIA dans la lutte anti blanchiment, le financement du terrorisme, la corruption et la fraude fiscale ;
- Cette annexe propose de poursuivre le dialogue sur ces questions en donnant le nom et les coordonnées d’interlocuteurs à la Direction de la Conformité de DEXIA.
La réponse de Société Générale se caractérise par les éléments suivants :
- Un courrier explicatif
- Accompagné du dernier rapport annuel (2010) ou du document de référence
- Mentionnant que la présence de SOCIETE GENERALE dans les ETNC a pris fin au terme de l’année 2010 ;
- Ne mentionnant pas la présence de SOCIETE GENERALE dans des ETC ;
- Ne fournissant aucune indication sur l’activité d’établissements ou filiales de SOCIETE GENERALE dans un paradis judiciaire et fiscal et aucune information sur la politique du groupe ou de la banque sur ce sujet ;
- Ne donnant aucune information sur la politique de lutte anti blanchiment de SOCIETE GENERALE
- Ne proposant pas de poursuivre le dialogue sur ces questions en donnant le nom et les coordonnées d’un interlocuteur spécialisé.
La réponse de CACEIS a simplement consisté à envoyer l’édition 2009 de la plaquette institutionnelle de l’établissement. La page 52 de cette plaquette constitue une forme de clin d’œil : elle présente les photographies du siège de plusieurs des établissements de CACEIS dont celui des Bermudes. La plaquette et le rapport annuel 2010 étaient déjà téléchargeables sur le site web de CACEIS au moment de la réception de sa « réponse ».
Appréciation générale
1 partenaire n’a pas répondu, la Caisse d’Epargne Lorraine Champagne-Ardenne, et un second a répondu hors délai, et au moyen d’une simple plaquette dépourvue des informations demandées. Ce sont nos deux lanternes rouges 2011.
CACEIS s’est contenté de l’envoi d’une plaquette périmée, assurant un service moins que minimum.
DEXIA a fait l’effort d’une réponse, mais qui évite soigneusement l’évocation de la présence ou non d’activités dans les ETNC ou même dans les ETC.
HSBC et Société Générale, s’ils peuvent mieux faire, sont les deux seuls partenaires à avoir accepté de jouer le jeu et d’entrouvrir la porte de la boîte noire.
S’ils ne sauraient prétendre aux félicitations du jury, puisqu’ils n’ont pas évoqué la question des ETC et de leur politique éventuelle concernant les PJF, ils méritent
- les encouragements du jury pour HSBC qui se révèle comme le « bon élève de la classe » pour cette première année ;
- une mention passable pour Société Générale qui aurait pu penser à proposer de poursuivre le dialogue.
L’article 7.4 de notre règlement budgétaire et financier prévoit une discussion des éléments reçus dans le cadre de l’application du 7.3. Je propose que cette discussion se déroule lors de la prochaine réunion de la commission des finances.
Les rapports annuels ou documents de référence reçus contiennent des informations sur les implantations des banques ou de leur groupe d’appartenance dans le monde. En les croisant avec les listes du GAFI (41 pays considérés comme financièrement opaques) ou de l’indice Financial Secrecy Indice (54 pays).